Nous vendons notre appartement et le syndic nous facture 160€ de pré état daté. Nous avons accepté par mail mais nous apprenons que la rédaction d'un pré état daté n'apparait pas dans les prestations facturables dans le contrat de notre syndic. Est ce que le syndic peut bloquer notre dossier pour l'acte de vente authentique si nous ne payons pas cette somme. Nous avons essayé d'en discuter avec le syndic, assistante qui m'a raccroché au nez. Mon conjoint a été mieux reçu que moi mais ils prétextent que notre accord par mail fait office de contrat et que comme il s'agit d'une prestation non obligatoire (et que nous pouvions le faire nous même) ils n'ont pas à le faire figurer sur leur contrat. Est ce bien le cas ? 

REPONSE 

Votre question est emblématique de la piètre qualité des textes législatifs actuels, dont les rédacteurs se préoccupent plus de l’impact électoral que de la cohérence avec l’ensemble existant.
 
Pour résumer le flou actuel, disons que :
La notion de pré état daté n’a pas de définition légale. C’est un petit résumé issu de la pratique, qui permet, lors de la signature d’une promesse de vente, d’informer l’acquéreur sur l’état débiteur (ou non) du lot sur le plan des charges.

Aux termes de l’art. L721-2 du CCH il doit mentionner :

a) Le montant des charges courantes du budget prévisionnel et des charges hors budget prévisionnel payées par le copropriétaire vendeur au titre des deux exercices comptables précédant la vente ;
b) Les sommes susceptibles d'être dues au syndicat des copropriétaires par l'acquéreur ;
c) L'état global des impayés de charges au sein du syndicat et de la dette vis-à-vis des fournisseurs ;
d) Lorsque le syndicat des copropriétaires dispose d'un fonds de travaux, le montant de la part du fonds de travaux rattachée au lot principal vendu et le montant de la dernière cotisation au fonds versée par le copropriétaire vendeur au titre de son lot.

Les informations mentionnées aux a, c et d du présent 2° sont à jour des informations soumises à l'assemblée générale annuelle chargée d'approuver les comptes précédant la signature de la promesse de vente.

À quoi sert-il ? à proprement parler, à rien.
Même si le lot vendu est fortement débiteur de charges, la copropriété les récupérera par ponction sur le prix de vente. D’une certaine manière, le vendeur est ainsi contraint de régler ses charges, celles-ci étant bloquées en amont par le notaire.
L’impact est donc nul pour l’acquéreur ; il existe certes quelques risques liés à certaines situations (si le syndic omet d’adresser une opposition art. 20, p. ex.) mais il s’agit de cas marginaux. Dans la pratique, qu’un lot soit débiteur de charges est indifférent. Les seules informations intéressantes sont le nombre de copropriétaires débiteur (mais là encore, que signifie « global » ? au lendemain de l’émission d’appels de fonds, la copropriété comporte d’énormes impayés, puisque les copropriétaires n’ont pas eu le temps de régler. En revanche, 2 mois plus tard il peut n’y en avoir plus du tout. La notion n’est pertinente que pour les impayés persistants, et là encore il existe une marge d’interprétation sur la durée, le montant…

Pourquoi les notaires exigent-ils un pré état daté, alors ? principalement pour pouvoir montrer que l’information de l’acquéreur a été maximale avant la signature de la promesse (rappelons qu’une promesse de vente vaut vente, sauf si elle est unilatérale au profit de l’acquéreur) et dégager ainsi leur responsabilité.

Le syndic peut-il facturer ce pré-état ? oui… et non ! enfin quelque chose de raisonnable.

Non si cette prestation n’est pas comprise dans sa grille tarifaire, ce qui sera toujours le cas puisque cette grille est fixée par décret et que ledit décret ne mentionne pas de pré état daté…

Oui, car il s’agit d’une prestation supplémentaire et qu’un syndic professionnel paie des salaires, des charges et a droit à la rémunération de son travail. Il n’est pas tenu de travailler bénévolement pour vous, ni à perte.

Dans ces conditions, soit le syndic est bénévole et il est normal que vous ne payiez rien, soit c’est un professionnel et il conviendra de se référer à son tarif de vacation à un taux horaire qui pourra varier entre 30 min et 1h maxi (fourchette que l’on peut qualifier de « raisonnable »).

Il est logique que ce soit le copropriétaire vendeur qui s’acquitte de cette somme, puisqu’il est à l’origine du changement de propriétaire au sein d’immeuble.

Enfin il n’est pas faux que vous pouvez établir votre pré état daté vous-même, mais aucun notaire à ma connaissance ne l’acceptera comme probant s’il n’émane pas du syndic. Il y a là encore un parfait flou légal. 

Bref, et en attendant qu’un rédacteur compétent se penche sur les textes, mieux vaut intégrer le fait qu’un pré état daté est souhaitable afin de garantir à l’acquéreur une bonne information préalable, ce qui sécurisera la vente. Puisque ce pré état n’exige pas de recherches comptables très approfondies sur le compte copropriétaire, certains syndics offrent cette prestation gratuitement, d’autres contre une somme modique. D’autres en profitent pour augmenter leur marge en toute opacité !

Le mieux à faire est d’interroger votre syndic, à titre préventif, sur ses pratiques tarifaires, et mettre en avant sur vos réseaux ceux qui facturent au plus juste du temps réel que réclame cette pseudo formalité.

Vous susciterez ainsi une concurrence saine, qui compensera le flou résultant de réformes certes bien intentionnées, mais adoptées à la va-vite sans réelle prise en compte de leur exécution pratique.
 

Réponse apportée par Maître Serge DIEBOLT.

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