D'ordinaire il est pénible aux copropriétaires de faire l'avance de charges pour leur immeuble. Ils se disent que cet argent serait mieux utilisé ailleurs. Ce qui constitue souvent un mauvais calcul, synonyme de frais.

Un syndic n'a que deux façons de combler le déficit de trésorerie d'une copropriété :
– soit il prélève sur ses fonds propres les avances nécessaires
– soit il prélève les fonds nécessaires à un immeuble déficitaire sur ceux d'un immeuble bénéficiaire de son portefeuille, en tirant des traites sur le principe que personne ne se présentera simultanément pour demander le solde immédiat de sa situation.

 


Cette tendance est quasi systématique au sein des gros cabinets.
Elle a toutefois entraîné des syndics de taille moyenne à la faillite, car certains de leurs immeubles ont été conjointement défaillants.
Pour éviter les dérives le législateur a échafaudé tout un arsenal :
obligation pour les syndics de tenir une comptabilité prévisionnelle en partie double, interdiction de compenser entre immeubles ou d'opérer des avances, obligation de proposer un compte bancaire séparé par immeuble…


Regardons les choses comme elles sont : la plupart des syndics ont fait de la résistance passive à ce dispositif. Un indice : votre syndic tente-t-il de vous dissuader d'ouvrir un compte bancaire séparé, en vous imposant des frais supplémentaires au prétexte (injustifié) de "frais de gestion", et en prenant prétexte que cette
gestion impose "plusieurs chéquiers" ? Vous avez certainement affaire à un syndic qui procède à de la résistance passive.
D'autres, en revanche, ne prélèvent aucun honoraire supplémentaire.
Preuve que la chose est possible.

Toujours est-il que la sécurité a un prix: certes on n'est pas rendu solidaire d'autres copropriétés déficitaires, mais le corollaire est de posséder un fonds de roulement, une avance de trésorerie pour faire face aux dépenses courantes.

Nous en revenons à la question posée.

Ici le syndic opère comme s'il agissait pour une copropriété avec compte séparé. Les impayés créent un "trou" qu'il lui est légalement fait l'obligation de combler. Au lieu de solliciter les autres immeubles de son portefeuille (ce qui est interdit) il fait appel aux fonds des autres copropriétaires, qui consentent là des avances de
trésorerie pour faire face à la carence de leurs voisins.
Nous sommes là en parfaite adéquation avec la loi.

Aucun "principe de solidarité" n'est édicté par celle-ci, mais tout le dispositif légal revient exactement au même.

Seules choses à faire :
– régler les appels de fonds pour ne pas compromettre la gestion de l'immeuble
– inviter le syndic à poursuivre en recouvrement les copropriétaires débiteurs (vous pouvez même obtenir la condamnation du syndic en cas d'inertie grave)
– en général, une reprise en main énergique du conseil syndical trouve une issue favorable en deux ans

Nota : les copropriétés dont les propriétaires ne parviennent plus à faire face au passif sont dites en difficulté, et peuvent être soumises au traitement de choc de la prise en charge par un administrateur judiciaire sur le fondement des articles 29 et suivants de la loi de 1965. Le remède, proche du régime des faillites, est aussi coûteux que destructeur sur le plan de la propriété foncière. Un audit assorti de dialogue et de pédagogie sont souvent un préalable bien préférable à cette option de dernière extrémité.

Réponse apportée par Maître Serge DIEBOLT.

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